Philosophie et activisme

Plusieurs militant.e.s et groupes activistes ont reproché à la philosophie classique d’être déconnectée des préoccupations et des réalités matérielles des gens « ordinaires ». On se positionnait alors en opposition avec la philosophie, qui était accusée de propager des fausses représentations qui avantageaient le pouvoir et les élites au détriment des classes sociales marginalisées. Bref, les idéaux de la philosophie classique – et notamment l’omniprésence de la dichotomie corps/esprit dans la discipline – reproduisaient plus souvent qu’autrement les rapports de pouvoir, au lieu de les déconstruire et de promouvoir le changement.

Cela étant dit, cette conception de la philosophie – c’est-à-dire isolée du changement et des luttes sociales – reste partielle. En effet, la philosophie a aussi participé activement à plusieurs résistances, et ce grâce à l’importance qu’elle accorde au développement de la pensée réflexive ainsi qu’à sa fonction créatrice : la philosophie investigue et produit des nouvelles significations, ontologies et perceptions dans le monde social. La philosophie apporte au militantisme, puisqu’elle souhaite comprendre, décortiquer et questionner les choses qui « vont de soi » les ou celles que nous n’avons toujours pas réussi à nommer.

Aussi, réduire la philosophie à une vision du monde unique ou à un groupe social particulier limite notre compréhension de l’exercice de la pensée. La philosophie est partout, elle ne se développe pas seulement à l’intérieur d’instances académiques ou officielles. On la retrouve également dans nos conversations entre ami.e.s, dans une promenade en forêt, dans une fête culturelle, dans un potluck communautaire, dans les histoires racontées par nos aïeux.les, dans notre journal intime et dans la rue.

Face à ces constats, plusieurs activistes-philosophes ont défendu une réconciliation de la théorie et de la pratique; les luttes de justice sociale étant guidées à la fois par des pratiques réflexives et une pensée agissante. Et cette réunion de la philosophie et de l’activisme se déploie dans une multitude de mouvements de résistance aux différents vecteurs d’oppressions qui structurent nos sociétés. Que l’on pense aux luttes anti-capitalistes, anti-colonialistes, anti-racistes, féministes, queers, anti-capacitistes, environnementalistes, LGBT, autochtones, etc.

De plus, la réconciliation de l’activisme et de la pensée a permis de situer la résistance dans des pratiques qui sortent du cadre « classique » des mouvements sociaux. En effet, si la philosophie se trouve partout, l’activisme a aussi plusieurs modes d’expression et de lutte : que ce soit par le sabotage numérique, par la guérilla, par l’éducation alternative, par l’art interactif, par la réinvention du sport, par la confrontation d’un.e proche, par une plainte institutionnelle, par la joie ou la colère, par la désobéissance, etc.

La philosophie peut servir de fondement moral et intellectuel à des mouvements de changements sociaux et politiques, ou elle peut se concentrer sur la recherche de « vérités » et la formulation de principes éthiques globaux. Les philosophes ont la capacité, et peut-être même la responsabilité, de remettre en question les normes et les valeurs dominantes, de proposer des alternatives et de promouvoir les changements sociaux. Les philosophes – en tant qu’activistes ? – peuvent contribuer à la construction d’une société plus juste, égalitaire et éclairée.

La thématique de ce second numéro ouvre de nombreuses perspectives de réflexion. Nous vous en présentons quelques exemples ci-dessous, mais notre appel de textes ne s’y limite pas :

  • Quelles sont les tensions entre la philosophie et l’activisme aujourd’hui ?

  • Est-ce que les philosophes ont un devoir de s’engager dans les luttes sociales ? Est-ce leur rôle de prendre parole dans l’espace public ?

  • Quelles formes alternatives d’activisme la philosophie permet-elle d’imaginer ?

  • Dans un monde de médias de masse et d’expansion numérique, comment la philosophie interagit-elle avec l’activisme ? Comment l’instantané conditionne-t-il la pratique, la pensée et leur relation ?

  • La philosophie est-elle en avance ou en retard sur l’histoire ? Sert-elle d’élan à l’activisme ou sa mission est-elle de l’expliquer à postériori ?

Nous vous invitons à explorer les relations complexes et dynamiques entre la philosophie et l’activisme. Les personnes intéressées peuvent soumettre leur texte en lien avec la thématique du numéro à l’une ou l’autre des rubriques suivantes :

Érudite

Longueur des articles : 13 000 à 17 000 caractères espaces compris

Description : Publication d’articles de vulgarisation des recherches actuelles en philosophie ayant une affinité avec la thématique du dossier. Cette section veut rendre accessible le savoir issu de la recherche en philosophie. Les articles de recherche, les commentaires critiques et les recensions de la littérature sont acceptés dans cette section à la condition que le lien avec le dossier thématique soit présent et explicite.

Argumentée

Longueur des articles : 10 000 à 12 000 caractères espaces compris

Description : Publication de courts articles ayant pour but de défendre une prise de position philosophique en lien avec le dossier thématique. Cette section est propice au débat public sur des sujets d’actualité. Dans cet ordre d’idées, il est possible de répondre à des publications des dossiers précédents de la revue dans cette rubrique.

Créative

Longueur des articles : 1-3 pages ou 4 000 à 8 000 signes

Description : Espace accessible et ouvert aux réflexions philosophiques de tout acabit soulevées par la thématique du dossier. Les propositions ayant une forme moins conventionnelle en philosophie sont encouragées (bande dessinée, fiction, poésie, conte, etc.)..

Collégiale

Longueur des articles : 10 000 à 12 000 caractères espaces compris

Description : Publication d’articles ayant pour but d’introduire les lecteurs à une notion ou une idée philosophique soulevée par la thématique du dossier. L’objectif de cette rubrique est de fournir aux professeur.e.s du collégial du matériel adapté à leur pratique et accessible à leurs étudiant.e.s.

Pour soumettre une proposition, veuillez consulter la section « Contribuer » de notre site web afin de respecter les normes éditoriales de la revue. Veuillez ensuite envoyer vos textes à l’adresse : info@lampadaire.ca. Dans votre courriel de soumission, prière d’indiquer votre nom, la rubrique choisie (érudite, argumentée, créative ou collégiale), votre affiliation institutionnelle et votre programme d’étude (si applicables). Veuillez prendre note que seuls les fichiers Markdown, Word, LibreOffice, LaTeX, RTF ou TXT sont acceptés.

Date de tombée : 21 juin 2024